Ah ah, voici enfin venir le premier article sur l'endroit définitivement le plus insolite de Copenhague, j'ai nommé
Christiania. Peut-être en avez vous déjà entendu parler même si vous n'avez jamais mis les pieds au Danemark... Il s'agit en fait d'un squat géant qui a pour particularités d'être toléré et en plus d'être situé au beau milieu de la ville. Plus qu'un simple squat même, c'est un village dans la ville, une sorte de communauté hippie autogérée, je dirais même un micro-état semi-indépendant. Les Danois l'appellent
"Fristaden", "la Ville Libre".
Pour avoir une idée du lieu, regardons une carte:
Christiania est situé sur la presque-île de Christianshavn (d'où son nom), et occupe une bonne partie des anciens remparts de la ville édifiés par le roi Christian IV en 1617 (les picots bizarres).
Tout ceci mesure la bagatelle de 34 hectares quand même.
Comme vous le voyez, la zone constitue une enclave de verdure, naturellement isolée du reste de la ville. Du côté de la rue Prinsessegade, il y a cependant un mur d'enceinte:
Et voici la célèbre entrée principale côté pile:
(photo Alex Rosa)
Et côté face:
Et ça c'est la petite entrée à l'angle de Princessegade et de Bådsmandsstræde:
Une fois cette entrée franchie, on pénètre dans un autre monde. Les bâtiments sont d'anciens baraquements militaires réhabilités par les Christianites eux-mêmes, ou bien des constructions de leur cru. Tout, absolument tout, est recouvert de tags, dont certains vraiment magnifiques. Le contraste avec la ville proprette et bourgeoise dans laquelle on se trouvait 5 minutes plus tôt est saisissant. En marchant un peu, on arrive dans Pusher Street, la rue principale. On y trouve une petite place du marché à l'entrée où l'on vend des tee-shirts souvenir, de la bimbeloterie diverse, et tous les accessoires nécessaires pour...
... confectionner des cônes. Et disséminés le long de la rue, des petits étalages avec de quoi les garnir généreusement. À cet endroit, il est interdit de prendre des photos comme le rappellent des panneaux un peu partout, ça ne plaît pas aux vendeurs. Et mon Dieu, que ça démange pourtant c'est terrible.
Du coup je me rabats sur une image dénichée sur Wikimedia Commons
C'est que la vision de tous ces étalages de substances, ces peintures murales extraordinaires, ces types un peu louches, ces pitbulls et tout ça dans une ambiance curieusement détendue, a quelque chose de fascinant. Mais la plupart des touristes de passage, effrayés par cette vision un peu glauque parfois j'avoue, n'osent pas s'aventurer plus loin. Beaucoup de Copenhaguois même n'ont que cette image en tête, ô combien réductrice.
C'est bien dommage, car Christiania n'est pas (seulement) un repaire de marginaux, même si elle en attire, et certainement pas un bidonville. C'est une société tout à fait structurée de gens qui ont fait le choix de mener une vie alternative. C'est comme si tout ce que le Danemark compte de subversif, de fantaisiste était regroupé dans un seul endroit.
Les habitants ont adopté un drapeau, qu'on retrouve partout:
On dit que les 3 points représentent les 3 i de Christiania
Il y a des règles de conduite
Les voitures y sont bannies
On y trie ses déchets aussi
Il y a même des visites guidées (jamais testé)
À chaque fois que je le visite (je dis bien à chaque fois), j'y découvre de nouveaux détails insolites.
Alors bien sûr, comme un seul article sur Christiania ne saurait suffire, je me propose de vous narrer la suite dans les prochains épisodes:
2ème partie:
Visite guidée du village (non, il n'y a pas que des cabanes croulantes et dégueues, il y a une vie culturelle et sociale hallucinante planquée à l'intérieur)